La célébrité avait ses avantages, mais elle avait aussi ses inconvénients, et Gabriel en faisait les frais ce soir. Il n’avait rien contre les fans ou les groupies, après tout c’était grâces à eux – ou plutôt en majorité à elles – qu’il devait son compte en banque si fourni, mais certains jours, leur attention était un peu trop pesante pour le jeune homme. Déjà bien éméché, le brun se frayait un chemin jusqu’au bar quand un cri strident vint lui déchirer le tympan. Il reconnaissait ce son entre mille, c’était celui d’une adolescente encore vierge qui venait de repérer l’objet de ses fantasmes à quelques mètres d’elle. « Putain. » Lâcha-t-il pour lui-même avant de se coller un sourire hypocrite sur les lèvres pour se tourner vers la petite rousse qui courrait dans sa direction. Merde, elle avait même pas seize ans celle-là, Gabriel allait toucher un mot au videur en sortant ! « Gabriel Reeds. Tu… vous… J’en reviens pas… J’ai vu tous vos films et je… je… » Le brun se mordit violement la langue pour ne pas sortir quelque chose de trop désagréable et attrapa la main tremblante de la jeune fille pour la calmer. Geste qui eu évidemment l’effet inverse et qui amena l’adolescente au bord de l’évanouissement. Heureusement pour elle – et malheureusement pour Gabriel – un autre cri strident se chargea de la sortir de sa transe alors que ses copines débarquaient en masse. Devant ce flot de jeunes filles affluant dans sa direction, Gabriel sentit ses forces l’abandonner et tourna les talons pour se réfugier dans la réserve. Il colla son dos à la porte soudainement prise d’assaut et soupira de soulagement quand Livie lui porta enfin secours. « Merci. » Lâcha-t-il essoufflé en se laissant glisser contre la porte de métal froid pour rejoindre la rousse au sol. Il croisa son regard puis posa les yeux sur la bouteille qu’elle brandissait et un large sourire étira ses lèvres. « Tu es décidément la femme parfaite Livie, je ne te le dirai jamais assez. » Il connaissait la serveuse depuis un moment maintenant, fréquentant le Red Bar depuis des lustres. Il aimait le caractère bien trempé de la rousse et – même s’il ne l’admettrait jamais – le fait qu’elle lui ait toujours résisté. La facilité avait parfois du bon mais rien ne valait une femme qui avait assez de tempérament pour ne pas se laisser traiter comme un morceau de viande. « Tu vas pas avoir d’ennuis avec ton patron ? » Demanda-t-il avec un geste vers la porte. Après tout il s’en moquait un peu de voler la rousse à ses clients, mais peut-être que le responsables des lieux ne seraient pas de cet avis…

La jeune femme arqua ses sourcils, étonné de voir Gabriel le remerciait. Puis un sourire prit place sur ses lèvres rosées. Après tout peut-être qu'il pouvait être sympa de temps à autre. « Mais de rien, je pense que tu m'es redevable Reeds. Et ne me fait pas le coup de l'autographe, tu sais très bien que ton joli petit minois finirait à la poubelle, dommage pour tes fans ? » dit-elle amusée. Il était vrai que le jeune homme venait souvent au bar, et leur relation n'était pas de toute repos, plutôt agitée. Plus il lui faisait du charme et plus la belle restait insensible, ou du moins elle s'en amuse à vrai dire. Lorsque la jeune rousse lui tendit la bouteille, celle-ci hocha la tête négativement. La femme parfaite ? Oh que non, la perfection n'existait pas à ses yeux. « Gardes-ça pour elles, tu sais que cela n'a aucun effet sur moi. » dit-elle en lui faisant un clin d’œil. Puis elle lui prit la bouteille des mains comme on enlevait un biberon à un nouveau né. Elle posa ses lèvres sur le goulot et but quelques gorgées. Wahou, ce whisky était vraiment fort. Clignant des yeux, la jeune femme tourna la tête vers Gabriel et plongea son regard azur dans celui du jeune brun, et fit une petite moue embarrassée. Bonne question, mais en y réfléchissant, Livie était une bonne employée et son patron l'aimait assez pour ne pas la renvoyer. La jeune rousse lui fit un sourire franc. « Oh tu sais ce n'est pas tous les soirs qu'une star de la télé vient nous rendre visite alors je pense qu'il n'y verra pas d'inconvénient à ce que je veille à ta sécurité. » dit-elle en riant légèrement. Puis inclinant la tête, la jeune femme reprit. « Par contre ce n'est peut-être pas l'avis de certains clients trop contents de me voir. » Tendant son bon whisky à Gabriel, la jeune Livie en profita pour coller son oreille contre la porte et déposa un doigt sur les lèvres du brun avant qu'il ne se mette à parler. Fronçant les sourcils, elle entendait encore quelques voix de filles, déçues pour la plupart, et hystériques pour d'autres. « Tu est une véritable source d'ennuis toi, on ne te l'a jamais dit ?  Et puis... doucement avec la bouteille, gardes-en pour après. » Sa voix était un murmure mais son ton se voulait un peu dur. Elle se remit en position initiale, le dos collé au mur, la tête en arrière balayant quelques mèches rousses d'un revers de la main.